La continuité écologique des cours d’eau

La fragmentation des milieux naturels est l’une des principales causes d’érosion de la biodiversité, tant pour les milieux terrestres que pour les milieux aquatiques. (Cf. la page sur Les continuités écologiques à La Réunion)
La présence d’obstacles à l’écoulement dans les cours d’eau entraîne une dégradation des milieux, des espèces et des processus écologiques qu’ils abritent.

On définit la continuité écologique des cours d’eau comme la possibilité, pour les espèces aquatiques, de circuler librement ainsi que la capacité de transport solide de ces cours d’eau.

Le rétablissement de la continuité écologique est une condition indispensable à l’atteinte de l’objectif de bon état des cours d’eau fixé par la Directive cadre européenne sur l’eau (DCE, 2000).
Dans le cadre législatif français, la DCE est transcrite sous la Loi sur l’Eau et les Milieux Aquatiques (Titre 1er : Eau et milieux aquatiques et marins- articles L210-1 à L219-18).
La mise en application de la loi est réalisée au travers du Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE).
La DCE indique une volonté de reconnexion amont - aval et transversale des cours d’eau à travers l’objectif d’atteinte du « bon état » écologique.

Le rétablissement de la continuité écologique s’envisage donc dans le cadre plus global d’une combinaison d’actions à mettre en œuvre pour restaurer un bon fonctionnement des cours d’eau et donc leur aptitude à des usages durables et diversifiés : il constitue l’un des 7 objectifs listés à l’article L.211-1 du Code de l’environnement pour parvenir à une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau.

Le Code de l’environnement prévoit deux leviers d’action importants pour atteindre le bon état écologique des cours d’eau, à savoir l’article L214-17 du Code de l’environnement qui définit les modalités de classement des cours d’eau pour bénéficier de mesures de protections particulières et l’article L214-18 relatif aux obligations des ouvrages en cours d’eau de respecter un débit minimal.

Le classement des cours d’eau en deux catégories

L’article L.214-17 du Code de l’environnement prévoit le classement en « liste 2 » des cours d’eau sur lesquels il est nécessaire d’assurer un transport sédimentaire suffisant et la circulation des espèces amphihalines, en intervenant sur les obstacles existants.
Ce classement n’impose pas une obligation de moyens mais de résultats : si l’ouvrage considéré permet d’assurer la continuité écologique de manière suffisante par rapport aux enjeux du cours d’eau et des espèces en présence, alors il est légalement possible de se limiter à la gestion régulière de l’ouvrage et au bon respect des prescriptions établies.
Dès lors que la continuité écologique n’est pas jugée satisfaisante, des obligations d’interventions adaptées aux ouvrages existants sur ces cours d’eau s’imposent aux propriétaires, dans un délai de cinq ans après le classement (prolongeable dans certains cas spécifiques de cinq ans supplémentaires).

L’article L.214-17 du Code de l’environnement prévoit également de classer en « liste 1 » les cours d’eau en très bon état écologique, jouant le rôle de réservoirs biologiques ou nécessitant une protection complète des espèces amphihalines, sur lesquels aucune nouvelle construction d’ouvrage constituant un obstacle à la continuité écologique ne peut être autorisée.

Les objectifs de ces deux types de classements sont complémentaires : il s’agit à la fois ne pas ajouter d’obstacles supplémentaires et d’améliorer la continuité écologique au niveau des obstacles existants pour permettre aux espèces de rejoindre les habitats leur permettant d’effectuer leur cycle de vie. Certains cours d’eau sont donc logiquement classés dans les deux listes.

À La Réunion, huit rivières (tout ou partie et avec tout ou partie de leurs affluents) ont été classées en « liste 1 » par l’arrêté préfectoral n°2015-2623/SG/DRTCV du 31/12/2015 et neuf rivières en « liste 2 » par l’arrêté préfectoral n°215-2624/SG/DRTCV du 31/12/2015.
Par ailleurs, le classement en liste 1 a été révisé en 2018 (Cf. arrêté préfectoral n°2018-1775/SG/DRECV) pour intégrer une plus grande partie de la rivière des Marsouins.

Cartographie classement des cours d'eau
 

La liste des espèces diadromes à prendre en compte pour le maintien ou la restauration de la continuité écologique au droit des principaux ouvrages complète le classement des cours d’eau au titre du L. 214-17 du code de l’environnement. Elle est issue de la note méthodologique « Espèces diadromes à prendre en compte dans le cadre du classement des cours d’eau au titre du L 214-17 ».
 

Il s’agit d’espèces de poissons et de crustacés diadromes cibles par ouvrage qui doivent être prises en compte à la montaison et à la dévalaison dans les études de faisabilité. Les ouvrages doivent être entretenus ou réhabilités pour permettre un franchissement libre de la faune diadrome ou être équipés de dispositifs de franchissement adaptés aux espèces cibles, sauf si l’impossibilité technique ou financière est démontrée par le maitre d’ouvrage ou, à défaut, l’exploitant.
 

Attention ! L’obligation d’assurer la continuité écologique n’est pas exclusive des seuls cours d’eau classés en liste 1 ou 2. Son rétablissement est un des intérêts mentionnés au 7° du I de l’article L. 211-1 du Code de l’environnement au titre de la gestion équilibrée et durable de l’eau.
Des prescriptions peuvent être imposées à tout moment aux ouvrages en lit mineur de cours d’eau non classés pour réduire leur impact sur la continuité.

Une politique de restauration de la continuité écologique a été mise en place par l’État en 2018, au travers du « plan d’action pour une politique apaisée de restauration de la continuité écologique ».
Il s’agit d’un outil de planification qui a pour objectif de lister les ouvrages prioritaires à traiter pour contribuer à l’atteinte du bon état des cours d’eau et de la biodiversité et ainsi hiérarchiser les interventions à mettre en œuvre sur le territoire.

Les critères de priorisation sont fondés avant tout sur les enjeux liés aux engagements de la France en matière d’eau et de biodiversité donc sur des enjeux biologiques, des enjeux hydromorphologiques et sur les risques de non atteinte des objectifs d’état.

Ce travail de priorisation a été mené à La Réunion en 2019 aux côtés des partenaires institutionnels et techniques des milieux aquatiques.
Il s’appuie sur l’articulation de plusieurs sources de données disponibles localement, acquises notamment en application du programme de surveillance au titre de la DCE.

L’obligation de débits réservés

De nombreuses espèces de poissons et plus particulièrement les espèces amphihalines ont des besoins impératifs en termes de libre circulation pour accéder aux habitats vitaux et réaliser l’accomplissement de leur cycle biologique. Par ailleurs, les dispositifs permettant le franchissement de ces espèces, que ce soit pour la dévalaison ou pour la montaison, nécessitent également des débits minimums afin de garantir leur efficacité.

Le débit constitue la variable clé du fonctionnement des cours d’eau. Les régimes hydrologiques vont conditionner la morphologie de la rivière, les habitats et la biologie.
Aussi, la fixation de valeurs de débit minimum à réserver dans les cours d’eau constitue une mesure correctrice importante pour garantir le fonctionnement des écosystèmes soumis à des pressions de prélèvements et/ou de dérivation d’eau.

L’article L. 214-18 du Code de l’environnement concerne l’obligation légale de débit minimal à respecter pour les ouvrages en cours d’eau, garantissant en permanence la vie, la circulation et la reproduction des espèces vivant dans le cours d’eau, et l’obligation de calcul du module (le module est le débit hydrologique moyen interannuel d’un cours d’eau : c’est une synthèse des débits moyens annuels (QMA) d’un cours d’eau sur une période de référence conséquente, en général d’au moins trente ans de mesures consécutives).

Le débit minimal à maintenir dans le lit du cours d’eau « ne doit pas être inférieur au dixième du module du cours d’eau en aval immédiat ou au droit de l’ouvrage ».
Ces valeurs planchers ont pour objectif de garantir à minima l’intégrité du cours d’eau soumis à de fortes pressions d’usages de l’eau.

Les ouvrages susceptibles d’être concernés par le L.214-18 sont tous les ouvrages barrant partiellement ou totalement le lit d’un cours d’eau et permettant une dérivation et/ou un stockage des eaux, sans distinction de statut ou d’usage, quel que soit le régime législatif d’autorisation auquel ils sont soumis.

Études volumes prélevables

Pour compléter l’approche entreprise par la définition du débit réservé en aval immédiat ou au droit d’un l’ouvrage, les études des volumes prélevables permettent d’améliorer les connaissances sur l’état des ressources et des besoins, en général l’échelle du bassin hydrographique, et amorcer une discussion sur le « partage de l’eau ».

Défini de manière simplifiée, le volume prélevable sur un bassin donné est la différence entre la ressource disponible (ressource naturelle) et ce qu’il est nécessaire de laisser dans le milieu pour garantir son bon état. Il vise à définir les débits minimums à respecter afin de garantir le bon état ainsi que les volumes pouvant être prélevés huit années sur dix sans restriction tout en respectant ces débits minimums.

Le décret n° 2021-795 du 23 juin 2021 relatif à la gestion quantitative de la ressource en eau et à la gestion des situations de crise liées à la sécheresse définit les volumes prélevables (VP) dans le nouvel article R. 211-21-1, il s’agit du : « volume maximum que les prélèvements directs dans la ressource en période de bases eaux, autorisés ou déclarés tous usages confondus, doivent respecter en vue du retour à l’équilibre quantitatif à une échéance compatible avec les objectifs environnementaux du SDAGE.
Ce volume prélevable correspond au volume pouvant statistiquement être prélevé huit années sur dix en période de basses eaux dans le milieu naturel aux fins d’usages anthropiques, en respectant le bon fonctionnement des milieux aquatiques dépendant de cette ressource et les objectifs environnementaux du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux.
Il est issu d’une évaluation statistique des besoins minimaux des milieux sur la période de basses eaux ».

L’évaluation des volumes prélevables (EVP) doit être réalisée sur un périmètre cohérent constituant tout ou partie d’un bassin hydrographique (ou d’une masse d’eau souterraine) sur une période de basses eaux fixée localement. Elle donne lieu à un arrêté répartissant les volumes prélevables par usage.

Les études sont réalisées à la demande des administrations ou dans le cadre du SDAGE pour évaluer les volumes prélevables, qui permettront de compléter l’approche qui consiste à maintenir un débit minimum dans le cours d’eau à l’étiage en un point donné, sans questionnement concernant les débits écoulés durant les autres mois de l’année et l’équilibre de la ressource à l’échelle du bassin.

Documents à télécharger

En savoir plus

Sur le site du ministère de la Transition écologique : Cours d’eau : continuité écologique, biodiversité et migrateurs amphihalins

La vidéo explicative de la DGALN sur ce qu’est la continuité écologique des cours d’eau, dont dépend toute la biodiversité.

Le Vrai / Faux de la continuité écologique des cours d’eau (vidéo, durée : 8 min 17 s)

MTECT/DGALN


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