Les chauves-souris de La Réunion


Écologie des espèces de chauves-souris de La Réunion

Les chauves-souris, que l’on appelle également « chiroptères », sont les seuls mammifères indigènes existant encore à La Réunion, les autres espèces connues comme le tangue ou le lièvre ayant toutes été introduites par l’homme.
La population de microchiroptères (chiroptères de petite taille) présente sur la frange littorale est principalement constituée de deux espèces : le Petit molosse de La Réunion Mormopterus francoismoutoui et le Taphien de Maurice Taphozous mauritianus.

a) Le Petit molosse de La Réunion (Mormopterus francoismoutoui) : Il s’agit d’une espèce endémique stricte de La Réunion. De petite taille (5 cm de long, 20 cm d’envergure, 5 à 8 g) au pelage brun à brun foncé, la queue dépasse nettement à l’arrière du corps. Cette espèce grégaire et insectivore s’active à la tombée de la nuit. Elle s’abrite dans les cavités naturelles ou en falaise : du fait de la raréfaction de son habitat naturel, le Petit molosse est l’espèce de chauve-souris qui colonise en grande majorité les constructions humaines, telles que les bâtiments d’habitation ou les ouvrages d’art.b) Le Taphien de Maurice (Taphozous mauritianus) : Cette espèce indigène de l’île est un peu plus grosse que le Petit molosse (8 cm de longueur, 30 cm d’envergure, 30 g). Elle s’en distingue également par un ventre blanc et un vol plus rectiligne. Elle se déplace à la tombée du jour. Cette espèce, majoritairement arboricole, s’abrite souvent dans les bois de filaos ou sous les feuilles de cocotiers, mais peut également gîter dans les fissures.

Ces deux espèces, grandes consommatrices d’insectes, aident à la lutte antiparasitaire en consommant des insectes piqueurs vecteurs de maladies humaines ou encore des insectes ravageurs pour l’Homme et les cultures (mites, termites, vers blancs adultes, etc.).

A titre d’exemple, un individu de Petit molosse consomme l’équivalent de 3000 moustiques par nuit !

c) Enfin, quelques d’individus d’une espèce de chauve-souris de grande taille, la Roussette noire (Pteropus niger), sont revenus sur l’île à partir de populations originaires de Maurice probablement en faveur d’événements météorologiques particuliers. Cette espèce endémique des Mascareignes, considérée disparue de l’île jusqu’en 2007, mesure une vingtaine de centimètres de long et atteint jusqu’à un mètre d’envergure. Frugivore, elle vit dans les arbres et peut éventuellement être aperçue lorsqu’elle s’active, du crépuscule à l’aube. La population de cette espèce est très restreinte localement et se limite à quelques dizaines d’individus localisés sur un seul site.

Les chauves-souris sont des mammifères dont les femelles mettent bas d’un seul petit par an.
Les cycles de vie des chauves-souris varient en fonction de l’espèce et de sa localisation. À La Réunion, ils sont encore mal connus : on sait toutefois que le pic de reproduction des espèces de microchiroptères a lieu durant l’été austral.

À cette période particulière, les individus se regroupent en d’importantes colonies et sont alors particulièrement vulnérables au dérangement.

Une fois les jeunes élevés, vers la fin mai, les chauves-souris se dispersent pour rejoindre leurs gîtes d’hiver.

La Roussette noire, quant à elle, met bas plus tardivement, de septembre à novembre en fonction des années.

Risques sanitaires

Longtemps craintes et mal connues, ces espèces ne sont pourtant pas dangereuses pour l’Homme. À ce jour, aucun cas de transmission de zoonoses par les chauves-souris n’a été rapporté à La Réunion.

Il existe toutefois des cas de réactions allergiques et d’hypersensibilité liés à une exposition prolongée aux excréments de chiroptères.

À noter cependant que, mélangés à la terre en petite quantité, ces excréments constituent un très bon fertilisant agricole qui ne génère pas de nuisances olfactives ou sanitaires.

Statut de protection des espèces

Les trois espèces de chauves-souris de La Réunion sont protégées par l’arrêté ministériel du 17 février 1989. Par ailleurs, l’article L.411.1 du Code de l’Environnement définit notamment les modalités de la conservation des espèces animales non domestiques et de leurs habitats.
Pour ces trois espèces, il est interdit de les détruire, de les capturer, de les enlever, de les déranger, de les transporter ou de détruire leurs habitats.

Les sanctions pénales encourues s’élèvent à 150 000€ d’amende et à 3 ans d’emprisonnement : elles peuvent être doublées en cœur de parc national ou au sein d’une réserve naturelle. Par ailleurs, en cas d’infraction en bande organisée, les sanctions s’élèvent alors à 7 ans d’emprisonnement et à 750 000€ d’amende.

Cohabitation parfois problématique

Les activités humaines et la modification des paysages ont entraîné une diminution du nombre de gîtes naturels disponibles pour les espèces de microchiroptères, qui ont alors souvent tendance à profiter d’une nouvelle source d’abris en extension : les constructions humaines.
Les odeurs incommodantes et la gêne occasionnée par l’accumulation des déjections de chauves-souris rendent parfois la présence de chauves-souris dans le bâti conflictuelle.

Toutefois, maintenir les gîtes des chiroptères en place et permettre une cohabitation sans encombre entre Hommes et chauves-souris représente une condition primordiale pour la survie à long terme de ces espèces protégées.

Quand la cohabitation se complique…

Lorsque la présence de chauves-souris est constatée au sein d’un bâti, la pratique à mettre en œuvre en première intention est le maintien de la cohabitation aux côtés des chiroptères tout en limitant les nuisances ressenties. Pour ce faire, la mise en place d’aménagements simples et/ou de pratiques notamment d’entretien et de nettoyage régulier des excréments permettent déjà de limiter fortement la gêne occasionnée.


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En cas de difficultés rencontrées lors de la cohabitation avec les chiroptères, il est possible de contacter l’association Groupe Chiroptères Océan Indien (06 92 67 65 72 ou contact@gcoi.org).

Cette association peut vous apporter des conseils et des informations sur la prise en compte des chauves-souris et vous accompagner vers une meilleure cohabitation avec l’espèce.

Lorsque les interventions permettant de favoriser la cohabitation avec l’espèce ne suffisent pas à régler les difficultés de cohabitation, la délocalisation hors du bâti d’une partie ou de la totalité de la colonie peut parfois être souhaitée. Cependant, la perturbation intentionnelle et la dégradation des aires de repos et de reproduction d’espèces protégées nécessitent l’obtention d’une dérogation qui, en application de l’article L.411-2 du Code de l’environnement, doit rester une démarche exceptionnelle.

La délivrance de cette dérogation doit être justifiée par les motifs fixés au 4° du I de l’article L. 411-2 du code de l’environnement, à savoir : « qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante », que « la dérogation ne nuira pas au maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle » et que les interventions et travaux envisagés pour délocaliser les chauves-souris répondent à des « raisons impératives d’intérêt public majeur ».

En effet, les interventions sur ces espèces protégées sont strictement encadrées de manière à limiter les impacts sur les individus en intervenant de manière phasée dans le temps et en prenant des précautions particulières pour ne pas piéger les individus dans leur gîte.

Au vu des connaissances actuelles, il semble que la période de moindre vulnérabilité pour intervenir sur les gîtes de Petit molosse, espèce rencontrée en majorité dans le bâti, soit entre mi-juin et mi-septembre.
Pour autant, toute intervention même à cette période, impacte les individus et doit donc être élaborée et suivie par des spécialistes pour limiter au maximum le dérangement et le risque de mortalité induit ainsi que l’appauvrissement de leur habitat, et ce, même pour quelques individus.

Prise en compte des chiroptères dans les projets d’aménagement à La Réunion

Le guide pour la prise en compte des chiroptères dans les projets d’aménagements à La Réunion est un outil d’aide à la décision au travers de recommandations pour une meilleure prise en compte des chauves-souris dans les projets d’aménagement.

Fruit du travail collaboratif d’experts locaux provenant des milieux associatif, public et privé, il a été financé par des aménageurs locaux (SIDR et Société 3H) dans le cadre de mesures d’accompagnement et réalisé par le bureau d’études Biotope, dans l’objectif de mieux intégrer ces espèces protégées aux projets d’aménagement : les recommandations sont fournies par grands types de projet d’aménagement et données en amont des projets, lors de leur conception, au cours de leur mise en œuvre puis tout au long de leur fonctionnement et exploitation.

Dossier de demande de dérogation au titre des « espèces protégées »

Le dossier de demande de dérogation pour intervenir sur les espèces protégées de chauves-souris comprend un ou plusieurs CERFA à remplir selon l’intervention souhaitée, accompagné(s) d’un document détaillé de demande.

L’octroi de la dérogation est fondé sur l’examen de ce document qui est joint au(x) formulaire(s) CERFA : il doit donc apporter tous les éléments nécessaires à cet aboutissement, être à la fois approprié, clair et synthétique. Il doit notamment intégrer et décliner la séquence « Éviter, Réduire, Compenser » (Pour plus d’informations, le Guide méthodologique ERC pour l’île de La Réunion).

Les demandes de dérogations « chiroptères » sont instruites par le Service Eau et Biodiversité de la DEAL Réunion (ubio.seb.deal-reunion@developpement-durable.gouv.fr).
Parfois, plusieurs échanges sont nécessaires entre le demandeur et la DEAL afin de faire évoluer et aboutir le dossier.
La procédure, encadrée par des textes nationaux, prévoit par ailleurs le recueil de l’avis préalable du Conseil Scientifique Régional du Patrimoine Naturel (CSRPN).

Attention ! En raison du statut de protection des chauves-souris à La Réunion, vous ne devez en aucun cas prendre l’initiative de déplacer les colonies, de boucher les accès à leurs gîtes ou encore de déranger les individus. Les interventions sur les chiroptères ne peuvent avoir lieu qu’après l’aval des services de la DEAL et l’obtention d’une autorisation spécifique.

Pour en savoir plus


(Illustrations : remerciements à Nadia CHARLES et RNN de l’Étang de Saint-Paul).

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